Nanterre peut se prévaloir d’une histoire riche, passionnante et encore trop méconnue. Qui en douterait ? En tout cas pas eux. Depuis presque cinquante ans, Jeannine et Robert Cornaille mènent une vie indissociablement liée à celle de leur ville. Tout commence en 1971 lorsque l’ancien maire, Raymond Barbet, décide de fonder la Société d’histoire de Nanterre (SHN). Cela tombe bien pour le jeune couple qui a dû « s’exiler » à Courbevoie mais qui reste très attaché à sa ville et prend une part active à l’initiative. « Plutôt qu’un cercle d’érudits, on voulait que la SHN soit ouverte à l’ensemble de la population, et notamment aux élèves des écoles. » Depuis, Robert, devenu président de la SHN en 1988, et sa femme n’ont cessé de poursuivre et de diffuser leurs recherches aux côtés d’autres passionnés. Vecteur essentiel, Nanterre info, mais aussi des bulletins et une lettre mensuelle dans lesquels ils abordent toutes sortes de thèmes : l’évolution des stations-services, les usines automobiles, la construction des groupes scolaires, les plaques de rue... Leurs sources sont multiples : archives municipales ou départementales, photos et cartes postales d’époque, et bien sûr Internet. C’est d’ailleurs en surfant sur le Web que Robert a retrouvé la trace d’un ancien champignonniste nanterrien (lire Nanterre info 420, avril 2017) qui a exporté son savoir-faire aux États-Unis.
Les rencontres avec les témoins directs d’une époque sont aussi très précieuses. « En ce moment, je travaille sur le développement du chemin de fer à Nanterre, ses incidences sur le tissu urbain de la ville, les conséquences de l’électrification... Je m’appuie sur les archives SNCF du Mans et je rencontre aussi des cheminots à la retraite », raconte Jeannine. De son côté, Robert étudie l’histoire du Centre d’accueil et de soins hospitaliers (Cash) depuis sa construction en 1879 lorsqu’il était une prison et un dépôt de mendicité. Autre site emblématique de la ville qui les passionne, les « Papets ». «On craignait que les archives de l’entreprise ne disparaissent. Alors, on a convaincu les archives départementales de les reprendre. On espère qu’elles seront bientôt mises à la disposition du public. »
À LA DÉCOUVERTE D’UN AUTRE NANTERRE
Mettre à jour et préserver les traces de l’histoire : ce rôle de vigie leur tient particulièrement à cœur lorsqu’il s’agit des richesses du sous-sol nanterrien. « Il y a quelques années, on rentrait des courses et il y avait des travaux rue de l’Église. En passant à côté de la tranchée, on a vu un sarcophage coupé avec un squelette à l’intérieur. Nous avons fait arrêter le chantier et fait procéder à des fouilles », racontent-ils encore sidérés par l’événement. Leur souhait serait d’ouvrir, sinon un musée local, du moins un site qui permettrait d’exposer toutes les découvertes réalisées au cours des diverses fouilles. Mais pour eux, une façon encore plus simple d’approcher l’histoire de la ville est d’arpenter ses rues en prenant le temps d’observer. « _Les gens découvrent un Nanterre qu’ils ne soupçonnaient pas, avec ses anciens corps de ferme, ses façades décorées de céramiques Art nouveau. Je les incite juste à lever le nez_ », insiste Jeannine qui organise avec son mari et d’autres membres de la SHN des visites thématiques.
Mais au fait, d’où vient cette passion pour l’histoire locale chez ce retraité de la sécurité sociale et sa femme qui a longtemps été institutrice de maternelle ? C’est Jeannine qui répond : « _Nous avons toujours été curieux de tout et nous trouvons aussi le temps d’aller voir des expositions. Mais j’ai été très marquée par la transformation de mon quartier, les Fontenelles, et l’expropriation de ma famille. Ça m’a sensibilisée au fait que les choses peuvent disparaître et que les traces sont importantes. »