Rabuss n’est pas trop habitué aux projecteurs et est plus à son aise dans sa « grotte », un appartement en sous-sol qui lui sert aussi d’atelier dans le centre ancien. Le jeune homme âgé de 31 ans y peint des portraits à la bombe sur des toiles. « Je ne suis pas un graffeur de rue, même si je suis déjà parti en virée avec des potes. Je préfère produire tranquillement dans mon atelier. Comme j’habite à côté de la Maison de la musique, j’ouvre ma petite fenêtre et j’écoute les élèves du conservatoire chanter et jouer de la musique. J’entends des choses merveilleuses… »
À voir les dizaines de toiles qu’il stocke, on se dit que Rabuss n’a pas chômé depuis toutes ces années. Grand admirateur de Banksy, il utilise, comme l’artiste britannique, la technique du pochoir pour dénoncer mais aussi pour rire. « L’humour et le sens de la critique de Banksy m’inspirent évidemment. Mais j’aime aussi les surréalistes, Van Gogh… Je n’ai pas vraiment d’univers, mais j’ai des sentiments qui transparaissent, je l’espère, dans mes œuvres. »
UN ARTISTE LIBRE
Depuis quelques mois, Rabuss s’essaie à la sculpture et reproduit des petits bonshommes qu’il avait dessinés au collège. Comme à son habitude, il se forme seul, connecté à Youtube, pour se documenter. « Tout le monde me dit de faire du pochoir car c’est ce qui marche en ce moment. Je ne fonctionne pas comme les artistes monomaniaques ou opportunistes, je produis selon mes envies et mon humeur du jour. »
Pour l’heure, l’art ne suffi t pas encore à payer ses factures. « Même si je vends un peu, les recettes ne couvrent même pas mes achats de matériel. » Rabuss a commencé à écouler ses toiles en participant trois années de suite au salon Art shopping au Carrousel du Louvre. C’est là qu’il a noué ses premiers bons contacts. « Je n’ai pas grandi dans un milieu d’artistes, je n’avais pas de carnet d’adresse et je ne connaissais absolument pas les codes. Quand on m’a demandé le prix de mes toiles, j’étais très embêté. »
Julien est issu d’une famille du centre ancien, un père électricien et une mère comptable, également présidente du club de judo de Nanterre. « Mon enfance était sympa, je faisais du judo et de la natation, j’allais à l’école Sainte-Geneviève et je suivais des cours de dessin. » Puis, son goût pour les arts plastiques l’a amené à suivre un BTS de graphisme. « Après mon diplôme, j’ai cumulé les stages en agence de publicité mais le travail n’était pas assez créatif pour moi. »
Julien a mis du temps à trouver le job qui lui offre la disponibilité horaire et d’esprit pour se consacrer à l’art. « L’an dernier, j’ai décroché un CDI à La Poste, je suis donc facteur à Nanterre. Cela me permet de redécouvrir la commune dans laquelle j’ai grandi. Moi qui croyais qu’il ne fallait pas mettre les pieds aux Pablo ou à la Zilina, je ne rencontre que des gens chaleureux qui m’offrent le café. Je vois même des cadres de La Défense faire leur footing dans les Pablo et dans le parc André-Malraux. »