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PATRIMOINE

« Nous sommes juste les passeurs de Notre-Dame »

Par Isabelle Fruchard

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À la tête de l’entreprise de taille de pierre Hérès au Chemin-de-l’Île, Louis-Joseph Lamborot réagit à l’incendie qui a ravagé la cathédrale Notre-Dame le 15 avril.

Au cours de votre carrière, vous avez été amené à travailler sur Notre-Dame. Comment avez-vous réagi lors de ce terrible incendie ?
Louis-Joseph Lamborot :
J’étais effondré. C’était un drame pour moi. J’ai travaillé plus de trente ans dans la restauration des monuments historiques, notamment ceux de Paris, dont Notre-Dame. La restauration du Pont-Neuf, par exemple, s’est faite ici, mais aussi celle de la tour Saint-Jacques, du dôme et du cloître du Val-de-Grâce, du dôme des Invalides, de la cour carrée du Louvre… Je suis donc par nature sensible à tout ce qui touche ce domaine. Au départ, j’ai travaillé pour l’entreprise Chevalier, puis j’ai racheté son atelier de taille de pierre qui est devenu Hérès. Nous étions d’abord installés à Rueil en bord de Seine, puis nous avons déménagé à Nanterre en 1987.

Quel a été votre travail sur Notre-Dame ?
L-J. L. :
Nous avons travaillé sur les balustrades hautes, le long d’une trentaine de mètres, ainsi que sur toute la partie arrondie du chœur. C’était dans les années 1990. Nous sommes également intervenus sur les pinacles. Nous fournissions la pierre à l’entreprise chargée de la restauration. J’ai souvent travaillé en sous-traitance pour des entreprises de restauration de monuments historiques.

Quelle est votre conception de la reconstruction de la cathédrale ?
L-J. L. :
Pour moi, il faut restaurer à l’identique et non pas faire un projet contemporain. C’est un monument incroyable, de plus de huit cents ans, qui a traversé des siècles. Nous en sommes juste les passeurs. Il faut rester très humble par rapport à un tel édifice, et je trouve assez prétentieux l’idée de marquer son époque. Il faut respecter le monument, prendre le temps de bien réfléchir au type de restauration pour préserver au maximum son intégrité, analyser l’édifice pierre par pierre et ne changer que celles qui sont en mauvais état. C’est un travail d’analyse très important.

Que pensez-vous du débat sur le délai de restauration ?
L-J. L. :
À l’échelle de temps de ce monument, je trouve aberrant l’objectif d’être prêts pour les Jeux olympiques. Peut-être que l’on peut réaliser le chantier en cinq ans, mais il ne faut surtout pas se précipiter. Dans tous les cas, la durée ne peut pas être un objectif.

Envisagez-vous de participer au futur chantier ?
L-J. L. :
Il est possible que nous soyons mis à contribution par le biais d’entreprises de restauration. Des architectes en chef des monuments historiques vont être nommés pour faire l’analyse de la situation et élaborer un projet de restauration. Puis, un appel d’offres sera lancé. Les financements sont plus que suffisants, et donc la restauration peut aller très vite. Il y a assez d’entreprises qualifiées pour prendre le chantier en charge, et nous interviendrons en sous-traitance si elles sont en sous-capacité.

Lire le portrait de Louis-Joseph Lamborot